INDIAN
Documentaire et installations vidéos 2001-03
36’ Pal, Productions : le Fresnoy
"L'Indian" a été financé grâce au Fond Image/Mouvement
Indian est un film sur un voyage en Inde, un voyage peut être transcrit sous la forme d’un journal mais celui-ci est écrit à posteriori. Mes déplacements me menaient de l’aéroport de Paris à celui de Koweït, de la gare de Delhi à celle de Calcutta, de Calcutta à Darjeeling, de Darjeeling à Bangalore, de Bangalore à Bombay…De Bombay à Koweït, de Koweït à Paris. La boucle est bouclée.
Le cheminement à l’échelle planétaire m’amenait à filmer des conditions d’être et des situations hétéroclites, c’est un film en perpétuelle transition où le déplacement de la caméra détermine un
changement incessant des conditions de prise de vue et d’esthétique des images.
Mais aujourd’hui, mon voyage appartient déjà à mes souvenirs et mes souvenirs ne sont plus des certitudes tant ceux-ci sont liés à des étonnements et des chocs quotidiens.
Notes de Réalisation
Le 11 septembre 2001, je travaillais au montage de L’Indian. A la nouvelle des attentats, j’enregistre le son direct des télévisions françaises. Cette bande sonore est illustrée par les images répétées et accélérées d’appartement et de leurs habitants filmés à travers les baies vitrées d’un immeuble. Cette première séquence s’intitule World Trauma Channel.
Les différentes séquences qui composent Indian sont conçues pour être projetées séparément, soit en programmation ou en installation.
La différence entre tel et tel état de condition humaine, tiers-monde et monde occidental, me donne la possibilité, en juxtaposant des images et des réalités dans un montage, de créer un zapping, un aller-retour, un ici et un ailleurs cinématographique.
Ce ne sont donc pas exactement ces mémoires mais plutôt une fiction avouée de ces mémoires ; je ne veux pas parler du passé mais asssembler pour le présent, avec ce que cela comporte comme distanciation avec les images que j’ai prise. Je choisis aussi de monter ces séquences vidéos d’une manière subjective, utilisant des effets sonores et visuels surajoutés : sonneries, lettrage, boucle visuelle, bande sonore off.
Un film possède le son et les images, si Deleuze comparait celles-ci à des blocs, c’est parce qu’il existe au cinéma une fragmentation que l’on ne trouve pas dans le réel. Au cinéma, nous pouvons dissocier notre réception de l’image et du son. Par contre, dans le réel, ignorer un seul de nos sens revient à ignorer le réel dans sa totalité.
Un son asynchrone n’est pas une voix off, la voix colle l’image, le son s’en détache. La subjectivité induite par les limites du cadre de la caméra devient sensible lorsque le son et les voix ne sont plus celles du réel.
La dissociation de l’image et du son délimite un espace au spectateur ; conférer au spectateur une place de choix: entre l’image et le son ; le film évolue vers une plus grande subjectivité d’interprétation.
Indian : un titre en anglais pour un film à la forme d’une image en perpétuel changement et mouvement. D’une situation humaine à une autre, d’une situation représentée à une autre…
Une manipulation de l’image et du son pour représenter le choc (intime) transitionnel entre les particularités de plusieurs situations géographiques et humaines. Des images interstitielles d’un étranger à ce qu’il rencontre pour faire un film sur le déplacement dans un monde global, où la subjectivité propre à une situation locale trouve ainsi une énonciation possible.